Quelle bibliothèque peut aujourd’hui faire l’impasse sur le livre numérique ?

De nombreuses actions s’organisent, pour comprendre, faire connaitre, montrer, explorer, découvrir… même si cela reste compliqué. Avez-vous lu les « actes » du Bookcamp Jeunesse du 11 avril dernier, l’atelier 3 était intitulé « Quelles médiations numériques en médiathèque jeunesse ? » , un sujet qui fait débat !
Si l’on reste encore dans l’expérimentation, on se rend compte que les éditeurs numériques jouent le jeu. Ils participent ! Cela n’arrondit pas les fins de mois, mais donne une certaine visibilité, et surtout, montre s’il en était encore besoin, que le numérique jeunesse produit des contenus que les bibliothèques revendiquent !
Des lieus : la BnF, et ses histoires de livres magiques (prochain RV le 29 mai) ;  la bibliothèque Municipale de Lyon avec RéCréation, un village virtuel dédié au numérique
Des rendez-vous : Mâcon, le 23 mai. Sous forme de journée d’étude, nous explorerons « la littérature jeunesse à l’heure du numérique » !
Le point commun de ces petites informations distillées ici, la participation obstinée de La Souris Qui Raconte, qui s’insinue doucement dans ces lieus publics donnant accès à l’information, aux idées et aux œuvres de l’imagination.

Une expérience en bibliothèque peut contribuer à la compréhension du monde, faire découvrir le plaisir d’une histoire d’enfant, fournir un conseil pour installer et sécuriser une conduite d’eau ou écouter le témoignage d’une personne âgée pleine de sagesse. Source IFLA

RéCréation, la bibliothèque réinventée


Le sujet fait actuellement débat sur le groupe LinkedIn du CRAK (cercle des éditeurs d’applications pour les Kids). Petit rappel pour les non initiés.

Le CRAK, inauguré en février dernier par Laure Deschamps de La Souris Grise, s’adresse aux éditeurs d’applications tels que La Souris Qui Raconte. Quant à LinkedIn, c’est un réseau professionnel (à la manière de Viadeo, mais en mieux, pour moi en tous cas !). Tout cela pour permettre – in fine – des mises en relation, des prises de parole et d’échanges entre professionnels !

Ceci étant précisé, je vais vous retranscrire quelques bribes de l’échange, initié par Michäel Guez de Chocolapps (site en maintenance à l’heure où j’écris), et vous donner mon ressenti, à la fin.
Je ne vous cache pas que, venant du leader du marché français, la question avait de quoi en surprendre plus d’un… et je confirme, sans trahir mes sources, nous avons été surpris !

Michäel G.

Avec la multiplicité des offres « Promos » sur l’Appstore… Ne sommes-nous pas TOUS en train de tuer le marché de L’App Payante ?

Après un grand moment de solitude (relisez mon article coup de gueule de mars dernier)… voici ce qu’on pouvait lire les jours suivants.

Laure D.

C’est un questionnement lié à un évènement particulier ou c’est une inquiétude générale ?

Domique Busso de Happy Blue Fish, éditeur de jeux ludo-éducatifs plutôt que de livres

Je suis d’accord avec Michäel, les promos il faut les utiliser très rarement… lorsque je repère un éditeur qui en fait régulièrement, j’attends toujours la prochaine promo pour acheter ses titres…

J’en passe quelques-uns qui s’éloignent un peu de la question initiale et traînent du coté de l’IAPs (comprendre In App Purchase, une partie gratuite, puis ensuite $… pour continuer d’avancer). Le jeu est très friand de ce modèle. Il s’appuie sur l’addiction !

Michäel G.

(…)
Lorsque nous sortons une nouvelle application, nous activons de nombreux leviers marketing (…). Nous parvenons le plus souvent à bien positionner cette nouvelle app au classement de l’appstore. Mais au bout de quelques jours, l’effet de la nouveauté s’estompe, et cette application s’enfonce mécaniquement dans les profondeurs du classement.
Pour faire remonter cette app, il n’existe malheureusement que très peu de solutions aujourd’hui. La plus efficace et la plus facile à actionner, est la baisse de prix temporaire. (…)
Mais finalement est-ce viable ? (…)
A force de faire des promos, ne sommes-nous pas en train d’habituer les consommateurs à attendre une baisse de prix pour acheter ? Au final, je pense que cela risque d’appauvrir la qualité de l’offre des éditeurs, car il ne sera bientôt plus rentable de proposer des apps riches en contenu (puisque non rentable, ou alors à très très long terme).

La Souris Qui Raconte

Bonsoir à tous, cette question est en effet assez tragique, et la promo tue sans complexe un marché par trop immature.
Qui crée l’offre ?
Si nous la galvaudons, c’est non seulement à nos dépends mais aux dépends du marché dans sa globalité.

Odile Flament de CotCotCot App

@Françoise, 200% d’accord. Ces promotions continues se font également aux dépends des artistes qui nous suivent et prennent des risques.
@Michäel, Nous n’avons pas encore un grand catalogue et nous ne pouvons (voulons) pas jouer au yoyo avec nos applis. Cette politique des prix fait partie de notre proposition de valeur lorsqu’on discute avec les auteurs-illustrateurs avec lesquels nous collaborons. En ce qui concerne « Bleu de Toi » par exemple, il était hors de question de le pricer trop bas afin de ne pas affaiblir le « prix de marché » de Dominique Maes. Nous ne prévoyons pas non plus de baisse de prix – sauf peut-être pour la fête des pères.

Sandrine Hervé de Slim Cricket

Les gens ont du mal à avoir de la considération pour les œuvres dématérialisées, la culture du gratuit dans ce type de produit est profondément ancrée.

J’ai extrait ici les quelques répliques qui m’ont le plus interpellée. L’intégralité est à retrouver sur le réseau LinkedIn. Si vous n’êtes pas inscrit, vous ne pourrez malheureusement pas y accéder.
Ce qu’il ressort à mon sens de ces échanges, est l’inquiétude générale des développeurs d’applications.  A moins que la question de Michäel G. ne soit que stratagème de découragement, subterfuge, qu’il prêche le faux pour savoir le vrai ou encore cherche du réconfort dans les réponses de ses coreligionnaires… ses inquiétudes sont légitimes et je plussoie à ses préoccupations !
A force d’observer les positions des uns et des autres dans l’App Store, j’ai constaté un vrai changement dans le paysage. Chocolapps, longtemps positionné dans le top 20, avec entre 10 et 15 de ses applications, perd progressivement de son leadership ! Son public aurait-il fait le tour de la question, et sa masse critique aurait-elle été atteinte ? Pour autant, comme bon nombres d’éditeurs, j’observe avec intérêt la réussite (ou non), d’une telle société ! Dans tout business il faut des succès pour lancer des marchés. Celui-ci ne décolle pas !

Comment dégager du chiffre d’affaire, et faire vivre une société avec un minimum de salariés dans un marché aussi complexe que celui de l’application – livre de surcroît – ? Que ceux qui vivent de leurs productions, après avoir payé 3 ou 4 salaires, sans avoir recours à de la prestation de service ou autre, se lèvent. Je doute fort qu’ils soient aussi nombreux que pour Danette ! Et j’augure sans hésiter qu’en France, ils se comptent sur les doigts d’une seule main. Et encore …
Les baisses de prix (ou pire la gratuité), relayés par tous les sites de critiques d’applications en ligne, La souris grise mais aussi DéclicKids, AppliMini, IDboox… font le jeu de cette mécanique. Leur lectorat guette ! En se faisant l’écho des fameux « BONS PLANS » , ils satisfont des consommateurs qui, avertis de ces pratiques, ont pris, en moins de 3 ans, de bien vilaines habitudes. A l’instar de ce que fait Dominique B., ils attendent !

Et pendant ce temps, les développeurs s’épuisent ! …
Je ne suis pas Madame Irma, et ma boule de cristal est juste une boule d’intuition, lovée au creux de mon estomac ! Après la folie hystérique générée par l’arrivée des tablettes, nouveaux outils tellement tactiles et tellement incontournables, le soufflé n’est-il pas en train de retomber ? Les nouveaux entrants entrent, ils font trois petits tours et ils ressortent, faute de pouvoir payer pour voir.
Nous avons tous coupé la branche sur laquelle nous étions assis. Le marché est mal emmanché, le consommateur mal éduqué. Et jusqu’à preuve du contraire, ma sœur Anne, je ne vois rien venir pour changer de cap !