C’est comme ça, Eliot est un ourson qui n’a ni pieds ni jambes ! Ça ne le dérange pas puisqu’il a des rêves plein la tête. France Quatromme nous livre une jolie histoire sur l’amitié, la volonté, le dépassement de soi, et Céline Chevrel en a réalisé les illustrations tout en tendresse et douceur.

France, après un premier ouvrage, Mon ami crocodile, publié chez La Souris Qui Raconte, tu as bien voulu me confier Le rêve d’Eliot. Dans ces deux histoires, il est question des petits chagrins de la vie, et du moyen de les surpasser ! Un thème de prédilection ?
F.Q. : Le thème de la différence traverse ce récit. Je pense que c’est d’ailleurs une préoccupation universelle qui parle aux plus jeunes comme aux adultes. Nous avons tous pu un jour souffrir de nous sentir différent. Au lieu de la porter comme un poids, l’assumer permet de la transformer en force. Ce thème revient fréquemment dans mon écriture.

Un petit retour sur les illustrations de Céline ?
F.Q. : J’ai découvert les illustrations de Céline avec émerveillement. Je trouve qu’elle a su magnifier cette histoire. Elles sont très oniriques.
La voix et la musique contribuent aussi beaucoup au ton de l’histoire à la fois poétique et joyeux.

Au-delà d’écrire, tu contes. C’est quoi le conte pour toi ?
F.Q. : Le Conte c’est avant tout un moment, une rencontre. Je m’attarde sur la vulnérabilité de l’homme qui doute et du monde qui tremble. C’est aussi le partage d’une utopie. J’y partage des rêves, la solidarité, l’écologie sur un ton poétique mais aussi bien souvent humoristique.

Que te permet-il de plus que la lecture simple d’un livre ?
F.Q. : Le Conte me laisse davantage de liberté. Il me permet d’être plus à l’écoute de moi-même et du public. Je peux raconter 20 fois la même histoire, elle n’aura jamais la même saveur.

T’arrives-t-il de faire des ponts entre tes livres et le conte ?
F.Q. : Le Conte influence mon écriture c’est certain. J’aime les symboles. J’ai cependant parfois l’envie de m’éloigner aussi de ce type de structure. L’écriture est un terrain de jeux pour moi, une aventure. J’écris des récits à la première personne, des livres très ludiques qui jouent avec l’illustration. L’écriture a certainement également influencé ma façon de raconter.

Céline, comme pour beaucoup de nos illustrateurs, Le rêve d’Eliot est votre première création numérique. Comment avez-vous trouvé l’exercice ?
C.C. : J’ai d’abord été très enthousiasmée par le thème de l’histoire et son écriture pleine de tendresse, c’est ensuite seulement que j’ai réalisé que mes illustrations seraient animées. Je n’avais auparavant jamais ouvert un livre numérique, et j’ai découvert que mon univers pourrait s’enrichir d’une autre dimension.

Quelles différences majeures cela a-t-il eu sur votre travail de création ?
C.C. : Je travaille encore « à l’ancienne », à la peinture et au crayon sur du papier, et j’utilise partiellement l’informatique pour retoucher, mais je n’avais pas anticipé toutes les étapes  d’une image animée et j’ai mis un peu de temps à rentrer dans cette nouvelle temporalité. J’ai dû détourer toutes mes images, une par une, et, je crois, les feuilles et les arbres d’une forêt entière! Mais je trouve le résultat incroyable.

A l’instar de France, vous diversifiez vos activités autour de la création. Vos boîtes, pour ce que j’ai pu voir sur votre site, sont superbes. J’y ai même retrouvé des illustrations qui figurent dans Eliot. Comment vous est venue l’idée de détourner de vieux objets ?
C.C. : J’ai toujours aimé les vieux objets un peu oubliés, j’ai voulu leur redonner une belle fonction : être l’écrin d’un monde marin imaginaire. Je crée dans des boîtes anciennes de petits cabinets de curiosité peuplés de baleines ailées, d’hippocampes, méduses et autres merveilles… qui se sont partiellement retrouvés dans les rêveries d’Eliot !

Les cabinets de curiosité de Céline

Toutes les deux, parlez-nous des enfants auxquels vous vous confrontez ! Pourquoi ces rencontres sont-elles nécessaires ?
F.Q. : Je me nourris des temps d’écriture et de solitude nécessaires à la création mais aussi de ces temps de rencontres. Le partage anime mon envie de continuer à écrire. Dans le conte, je sais tout de suite ce qui fonctionne ou pas dans une histoire. L’écriture à ceci de frustrant que je ne vois pas les enfants réagir à mes histoires. Je rêve d’être une petite souris dans l’ombre d’une chambre d’enfant au moment de la lecture…
C.C. : J’aime dire aux enfants que je rencontre qu’ils ne doivent pas arrêter de dessiner, qu’avec un simple crayon ils peuvent s’évader, inventer, se tromper, reconstruire… Je suis autodidacte et c’est mon enfance plutôt solitaire qui m’a permis de considérer le dessin comme un élément presque magique de ma vie.

Merci à vous deux pour vos réponses et pour cette belle fusion du texte et de l’image. Le rêve d’Eliot est une petite merveille de tendresse, qui se lit jusque dans les regards des animaux de l’histoire.


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